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[DOSSIER] L'histoire de la Game Boy (4ème partie)

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Message par Evola Mer 28 Déc 2022 - 10:31

(4ème partie)

Suite de:
- 1ère partie: Petite genèse de la Game Boy: Comment celle-ci a été possible ? https://www.gamopat-forum.com/t118325-dossier-l-histoire-de-la-game-boy-1ere-partie
- 2ème partie: les Game & Watch. https://www.gamopat-forum.com/t118333-dossier-l-histoire-de-la-game-boy-2eme-partie#3589507
- 3ème partie: La R&D1 réfléchit à l'avenir des Game & Watch: https://www.gamopat-forum.com/t118348-dossier-l-histoire-de-la-game-boy-3eme-partie


Bibliograhie de la 4ème partie:
- L'histoire de Nintendo n°4: La Game Boy de Florent Gorges



10 juin 1987 : le projet DMG est lancé

Selon Yoshihiro TAKI, il est difficile de dater l’origine exacte du projet visant à remplacer les Game & Watch qui aboutira à la Game boy : «  En réalité, nous n’avons jamais cessé de faire des recherches pour améliorer le concept des Game & Watch. Donc la Game Boy n’est que l’aboutissement de toutes ces recherches entreprises dès la fin des années 70 ... ».
Yoshihiro Taki
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Cependant dans l’Histoire de Nintendo n°4, Florent gorges, nous apprend que c'est le 10 juin 1987 que la division Nintendo Research and Development 1 (R&D1) dirigée par Gunpey Yokoi reçoit expressément l'ordre du Président Yamauchi de concevoir une console portable multisoft à un prix inférieur à 10 000 yens pour remplacer les Game & Watch. Deux hommes sont nommés pour effectuer les premières recherches du projet DMG (pour Dot Matrix Game) sous la direction de Gunpey Yokoi : Yoshihiro Taki et Takehiro Izushi. Ceux-ci étudient déjà les écrans à cristaux liquides depuis de nombreuses années. Ils élaborent un premier prototype à partir d’un agenda électronique de poche, le tout récent PA-7000 conçu par Sharp, dont l’écran monochrome se démarque de la concurrence par la finesse de ses graphismes et conçoivent dans la foulée un petit jeu consistant à attraper des libellules avec un filet. Les deux hommes constatent que la vitesse d’affichage et de désaffichage est trop lente produisant un désagréable effet de rémanence laissant une traînée noire dès qu’il y a un objet en mouvement (ce qui rend l’écran illisible) et déplorent la présence d’un seul dégradé de gris.
Takehiro Izushi
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Sharp PA-7000
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Malgré ses liens privilégiés avec Sharp, qui fabrique les écrans des Game & Watch, Nintendo décide dès le 17 juillet 1987, de réaliser une étude de marché auprès des fabricants d’écran miniatures et de faire jouer la concurrence. Rapidement la R&D1 va être sur la même longueur d’onde avec une firme, Citizen, qui leur présente un écran monochrome innovant de type Chip on Glass (COG), performant et moins cher que les technologies déjà anciennes proposées par Sharp qui ne peut pas s’aligner. L’écran de Citizen permet une économie d’espace et de connectique déterminante. En outre cette technologie est très souple et modulable puisqu’elle permet au client de choisir les performances de l’écran en terme de résolution graphique ou de dégradés de gris. Certes cette technologie est loin d’être de la même qualité qu’un véritable écran de télévision monochrome mais il est beaucoup moins cher et moins gourmand énergétiquement. « Il faut savoir, précise Taki, que d’un point de vue strictement mécanique, un écran de télé et un écran Game Boy utilisent les mêmes technologies d’affichage. C’est juste que les performances sont revues à la baisse pour une Game Boy. Or, vous vous en doutez, pour 1300 yens l’écran, on avait évidemment un écran avec une résolution bien plus faible, un rafraîchissement d’affichage plus lent et un nombre de nuances de gris plus réduit que pour une utilisation télévisuelle. »
Les hommes de Nintendo tiennent donc un écran viable techniquement. Reste à savoir, avant même que le projet DMG soit véritablement avancé, si celui-ci est viable économiquement. Des négociations serrées vont donc s’engager entre Nintendo et Citizen  comme l’explique TAKI: « A ce stade nous savions déjà que notre DMG était réalisable techniquement. Mais avant d’avancer plus loin dans le développement et l’élaboration du concept , nous devions aussi nous assurer que le projet était réaliste d’un point de vue économique. Donc chez Nintendo , les négociations économiques ont toujours lieu très en amont des projets. Pour faire simple, une idée de produit n’est bonne que lorsqu’elle est viable économiquement ! c’est donc la partie économique qui fait toute la différence ! Bref, il y a le concept de base, sa faisabilité technique et la viabilité économique. Une fois toutes ces étapes passées, on peut envisager le reste qui n’est que de l’ordre du détail. »
Le 22 août 1987 Taki, après avoir négocié une réduction sur les écrans de 1300 à 1000 yens en contrepartie d’un engagement de 100 000 écrans par mois, rédige un rapport qui donne le feu vert à la réalisation du projet DMG avec la collaboration de Citizen. Le projet est viable techniquement et économiquement. On peut donc passer à l’étape suivante à savoir la conception de la future Game Boy.

Battle Royale au sein de la division Nintendo R&D1:

Alors que Gunpey Yokoi est sur le point de valider le futur avec Citizen pour la partie écran, le 25 août 1987, lors d’une réunion au sein de la division R&D1 suite au rapport rendu par Taki, Satoru Okada remet en question le concept même de la Game Boy imaginée par Gunpey Yokoi. Cette crise met en lumière la guerre que se livrent les principaux cadres de la R&D1, qui ne sont d’accord sur rien. Depuis le début du projet les réunions sont orageuses. Deux camps s’affrontent. Celui de Gunpey Yokoi et celui de Satoru Okada. Ce dernier ne veut pas que la future console portable de Nintendo soit une évolution des Game & Watch. Ce qu’Okada veut c’est faire une famicom portable : « Pour que vous me compreniez bien , j’étais très motivé à l’idée de fabriquer une véritable famicom portable améliorée, avec un microprocesseur Ricoh encore plus performant. Je me disais que quitte à faire une console portable autant que ce soit la Famicom, le phénomène du moment ! Certes, l’écran serait resté en noir et blanc, mais cela nous aurait malgré tout permis de réaliser des portages de jeux facilement ! Et même d’avoir des jeux encore plus aboutis ! »
Satoru Okada
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Au cours de cette réunion du 25 août 1987, qui s’apparente à un véritable putsch, Okada prend le contrôle du projet DMG contestant frontalement la philosophie de Gunpey Yokoi :
«  J’étais totalement contre sa vision et même si Yokoi était mon supérieur direct je lui ai toujours tenu tête. On se disputait souvent à cette époque. Et un jour pendant une réunion, il a fini par craquer. Il en a eu marre et il m’a dit : ‘OK ça suffit ! Fais donc comme ça te chante !’. Là je lui ai répondu : ‘D’accord ! Vous me donnez toutes les responsabilités?’ et comme il a acquiescé, le projet Game Boy a finalement pris un chemin qui me semblait plus sûr ... »

Satoru Okada est désormais à la tête du projet, il a les mains libres pour réaliser une version portable de la Famicom et prend contact avec Ricoh pour concevoir le microprocesseur dont il aura besoin pour sa vision du projet DMG. Pendant ce temps Gunpey Yokoi annonce le 28 août 1987 au Président Yamauchi que Nintendo va travailler avec Citizen pour les écrans. Ce dernier valide et rendez-vous est pris avec les cadres de Citizen pour officialiser cette décision pour le 1er septembre 1987.

A ce stade on se dirige donc vers une console avec un microprocesseur Ricoh et un écran Citizen. Sauf qu’Okada a omis juste un petit détail, à savoir prévenir la R&D2 (qui a conçu la Famicom et développe la Super Famicom) de son projet de Famicom portable: « Quand Uemura l’a appris, il n’était pas content du tout. Il faut dire qu’il travaillait sur le projet Super Famicom et ne voulait pas qu’on empiète sur ses plate-bandes. Il nous disait ; `Ne bloquez pas les ressources de Ricoh avec votre projet ! Je vais en avoir besoin pour la Super Famicom ! Alors trouvez un autre partenaire !’ ». Dès lors, Okada ne pouvant pas travailler avec Ricoh, est contraint de se tourner vers un processeur 8 bits Sharp  LR35902, qui est un hybride de l'intel 8080 et du Zilog Z80, un processeur complètement différent du processeur de la Famicom, ce qui exclut le portage facile des jeux d’une machine vers l’autre.

Dès lors tout va déraper. Le 1er septembre 1987 alors que Nintendo et Citizen viennent d’officialiser leur collaboration, survient un coup de théatre. Le président Yamauchi fait machine arrière et décide, suite à une visite inopinée et une entrevue avec une délégation de Sharp, que Nintendo travaillera non pas avec Citizen mais avec Sharp pour la partie écran du projet DMG. Désormais la future Game Boy aura non seulement un processeur Sharp mais également un écran Sharp.
Suite à ce rétropédalage les pro-citizen subissent une purge et sont écartés de l’élaboration du futur écran Sharp de la Game Boy. Taki insinue qu’Okada ne serait pas étranger au sabordage de la collaboration avec Citizen : « Le mardi 25 août, donc, il y a eu une réunion houleuse entre Yokoi et Okada au sujet de mon rapport Citizen. Dans celui-ci, j’avais expliqué que le projet que nous imaginions était désormais parfaitement réalisable et que c’était désormais à eux de jouer, pour monter une équipe et aller jusqu’au bout. C’est là que j’ai appris qu’Okada avait récupéré toutes les responsabilités du projet. Pire, la semaine suivante j’apprenais qu’il n’avait plus du tout besoin de moi et que j’étais écarté du projet DMG … […] En gros, on m’a fait comprendre qu’il n’avait plus besoin de moi pour travailler avec Sharp. J’étais choqué d’entendre cela. Ce projet Game Boy, j’y tenais tellement ! Du coup, je suis allé voir Yokoi et je lui ai annoncé que je donnais ma démission … »
Yokoi va donc demander à Taki d’attendre et va intervenir pour redéfinir et redistribuer les responsabilités dans le projet DMG. Suite à une nouvelle réunion beaucoup plus apaisée il est décidé que la partie CPU serait déléguée à Okada. Yokoi, toujours officiellement directeur du projet, se réserve quant à lui la responsabilité de la partie écran avec Taki comme bras droit.
Gunpey Yokoi
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(A suivre ...)
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